June 5, 2019

Prise illégale d’intérêt et favoritisme : la Cour de cassation enterre l’argument tiré du principe ne bis in idem

Le principe ne bis in idem peut se définir comme le droit à ne pas être jugé ou puni deux fois. Il est expressément garanti par l’article 4 du protocole n°7 de la Convention européenne des droits de l’homme. Dans sa décision du 17 avril 2019[1], la Chambre criminelle de la Cour de cassation refuse de faire application dudit principe à l’occasion d’une double déclaration de culpabilité portant, d’une part sur le délit de prise illégale d’intérêt, et d’autre part sur le délit de favoritisme.

En l’espèce, le maire d’une commune se voyait reprocher d’avoir attribué un marché public de façon illégale et irrégulière à une société au détriment d’une autre, alors pourtant que celle-ci avait déposé un mémoire technique mensonger et hors délai, le tout à un prix supérieur à celui de son concurrent. Condamné à un an d’emprisonnement avec sursis, 5.000 euros d’amende et 5 ans d’inéligibilité, des chefs de favoritisme, au titre de l’article 432-4 du Code pénal, et de prise illégale d’intérêts, au titre de l’article 432-12 du même Code, l’édile a alors formé un pourvoi en cassation, estimant qu’il s’agissait là d’une violation du principe ne bis in idem.

Néanmoins, l’argument ne parvint pas à convaincre les magistrats qui ont jugé que les deux déclarations de culpabilité « sont fondées sur des faits dissociables ». Pour aboutir à une telle conclusion, la Cour de cassation a procédé à une analyse des deux délits en l’espèce. S’agissant du favoritisme, le délit est constitué « par les irrégularités commises en connaissance de cause par le maire durant la procédure de marché ». Pour la prise illégale d’intérêt, c’est « la seule décision prise par [le maire] de faire signer à l’attributaire du marché l’acte d’engagement des travaux et de publier l’avis du marché » qui caractérise l’infraction.

Orthodoxe pour certains, rigoureuse pour d’autres, la décision demeure en tout cas parfaitement conforme à la jurisprudence antérieure de la Cour[2] et ne surprendra donc pas ses observateurs avisés.

Saul Associés


[1] Crim., 17 avril 2019, n°18-83.025

[2] Crim., 8 mars 2006, n°05-85.276

June 5, 2019

Droit européen des sociétés : l’UE acte la mobilité transfrontalière des sociétés

Après des années d’atermoiements, l’Union européenne a fini par acter la mobilité transfrontalière des sociétés au sein des Etats membres.

A ce jour, la CJUE garantit aux sociétés localisées dans un Etat membre de l’Union européenne la liberté de pouvoir effectivement se domicilier dans un autre Etat membre[1] (notamment grâce aux fusions transfrontières ou au recours à une Société Européenne). Il n’en demeure pas moins qu’aucun dispositif idoine ne permet aujourd’hui aux sociétés de l’UE de transférer librement leur siège social dans un autre Etat membre. C’est sur ce point que se sont enfin entendues les institutions de l’Union européenne, fin mars 2019. La notion de libre mobilité implique tout d’abord que le transfert du siège social se fasse sans dissolution de la personne morale, ni liquidation.

Donc, premièrement, s’est posée la question des modalités du vote des associés concernant la décision de transfert du siège social. Le seuil du vote sera situé entre un minimum de 2/3 et un maximum de 90%, ce qui, en France, revient à le fixer au niveau requis pour les assemblées générales extraordinaires (AGE)[2].

Deuxièmement, de quels moyens juridiques doivent disposer les Etats pour empêcher les transferts qui répondraient à des motivations frauduleuses ou abusives, en particulier au plan fiscal ou social ? Il reviendra au Juge, et spécialement à la CJUE, de définir ce qu’est un transfert abusif ou frauduleux de siège social.

Cet accord, qui intervient à quelques semaines des élections européennes, réalise plus parfaitement la liberté d’établissement et la libre circulation des capitaux au sein des pays de l’Union européenne.

Saul Associés


[1] CJUE, 25 octobre 2017, n° C-106-16, Polbud

[2] En effet, la Directive prévoit une fourchette entre 2/3 et 90% mais en précisant que la majorité requise ne peut être supérieure à celle requise pour les fusions transfrontalières, en France calé sur celui des AGE (Articles 236-25 et 236-9 du Code de commerce).

May 27, 2019

ELAN et copropriété

Les objectifs de la loi ELAN sont ambitieux : clarifier, moderniser, simplifier et adapter le droit de la copropriété des immeubles bâtis dans son organisation et dans son fonctionnement. Pour les atteindre, le législateur procède par étape et prend son temps.

Il a adapté la loi n°65-557 du 10 juillet 1965. Cette intervention était tant attendue car les réformes successives n’avaient pas modifié la lettre du texte, et les solutions prétoriennes se multipliaient rendant complexe le droit de la copropriété.

Mais ce n’est que le début de la réforme car la loi a également autorisé le gouvernement à légiférer par voie d’ordonnance.

La première ordonnance qui devra être prise avant le 24 novembre 2019, a pour objectif l’amélioration de la gestion des immeubles et la prévention des contentieux. La seconde ordonnance qui devra être prise d’ici le 23 novembre 2020 va codifier l’ensemble des règles régissant ce droit.

Il va donc falloir patienter jusqu’à fin 2020 pour connaître le nouveau droit de la copropriété dans son ensemble.

Saul Associés 

April 23, 2019

Saul sur la levée d’1,2 M€ de Bloomin’

La startup Bloomin a réalisé une 1ère levée de fonds d’un montant de 1,2 M€.

Co-fondée en 2016 par Thomas Le Gac et Arnaud Testu, Bloomin est une startup de services aux entreprises – RH, basée en Ile De France.

Les investisseurs impliqués dans ce tour de table sont privés.

Saul Associés

April 19, 2019

SNC et droit d’agrément : Qui ne dit mot… abuse !

Qui ne dit mot… abuse ?  [1] 

Il n’est pas rare que la sortie d’un associé pose des difficultés dans les sociétés de personne, ce qui peut devenir lourdement préjudiciable à l’associé qui souhaite prendre sa retraite et qui se retrouve ainsi bloqué avec ses parts.

Singulièrement, les parts sociales des sociétés en nom collectif «  ne peuvent être cédées qu’avec le consentement de tous les associés »[2], ce droit d’agrément ne pouvant pas même être aménagé par les parties. Néanmoins, comme tout droit, son exercice est susceptible de dégénérer en abus[3]. Si l’abus du droit se conçoit aisément au travers de l’acte « positif » consistant à refuser l’agrément à un cessionnaire, l’abus par omission, par silence, était plus incertain.

C’est justement à cette question que vient répondre l’arrêt de la chambre commerciale du 6 février 2019. En l’espèce, l’associé sortant avait durant plusieurs années, entre 2009 et 2012, présenté plusieurs cessionnaires à son associé et ce, à des conditions différentes. Malheureusement pour le sortant, son associé, selon les termes de la Cour d’appel, s’était borné à « faire la sourde oreille à toutes propositions et opposer à tous ses correspondants le silence sans qu’il justifie d’un motif valable ». Arguant du fait que le refus d’agrément est un droit discrétionnaire, l’associé taiseux avait alors formé un pourvoi en cassation contre la décision des juges d’appel qui avait retenu un abus de droit.

Pour la Cour de cassation, confirmant ainsi la juridiction d’appel, ce « mur de silence »[4] est bien fautif. Ainsi, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, l’associé est condamné à réparer le préjudice du fait de son silence car « M. X… s’était fautivement abstenu d’exercer son droit d’agrément ».

A l’avenir, et en pratique, pour éviter que son refus ne soit considéré comme abusif, l’associé qui reçoit une demande d’agrément se doit d’y répondre dans un délai raisonnable.

Saul Associés


[1] Com., 6 février 2019, n°17-20.112

[2] Code de commerce, article L. 211-13

[3] Req., 3 août 1915, DP 1917. 1. 79, arrêt Clément Bayard

[4] A. TADROS, « L’abus du droit d’agrément dans une société en nom collectif, D. 2019, p.568.

April 15, 2019

Abus de confiance : le détenteur précaire, partie civile

En matière d’abus de confiance, il est fréquent de voir le propriétaire du bien se constituer partie civile.

Mais qu’en est-il de celui qui n’est qu’un simple détenteur du bien à titre précaire ? Selon un arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation du 20 mars 2019, qui s’inscrit dans la continuité de sa jurisprudence[2], ce dernier peut aussi se constituer partie civile.

Ici, le détenteur précaire était une société spécialisée dans la logistique qui avait conclu un contrat d’acheminement de déchets. A l’occasion de cette prestation d’acheminement, un des chauffeurs salariés du cocontractant avait eu la bonne idée de détourner fréquemment une partie de la cargaison.

D’après la « prévention » (l’ordonnance de renvoi), seule la société cliente était qualifiée de victime de l’infraction. Néanmoins, la société de logistique avait souhaité se constituer partie civile, en sa qualité de détenteur précaire du bien au moment des faits. Cette constitution avait alors été jugée irrecevable par la juridiction de première instance.

Par la suite, les juges d’appel et de cassation vont infirmer le jugement sur ce point En effet, peu importe « que la société [...] n’était pas expressément visée dans l’ordonnance de renvoi comme victime de l’abus de confiance commis par son chauffeur salarié », puisque « la désignation des victimes dans la prévention, non limitative, ne lie pas la juridiction de jugement ». En premier lieu donc, la Cour de cassation appuie l’arrêt d’appel en ce qu’il reconnaît aux juridictions de jugement la libre appréciation quant à la qualité ou non de victime. Dans un second temps, et c’est tout l’intérêt de la décision, la Cour de cassation constate que la Cour d’appel a justifié sa décision en jugeant que « l’abus de confiance peut préjudicier et ouvrir droit à réparation, non seulement aux propriétaires, mais encore aux détenteurs et possesseurs des biens détournés ».

Logique et opportune, la décision de la chambre criminelle de la Cour de cassation assure ainsi aux détenteurs précaires, victimes d’abus de confiance, la possibilité d’obtenir une réparation légitime en se constituant partie civile.


[1] Crim., 20 mars 2019, 17-85.246

[2] Crim., 5 avril 2006, n°05-83.130 ; Crim., 16 novembre 2005, n°05-80.540 ou encore Crim., 11 décembre 2013, n°12-86.624

April 4, 2019

Loi du 23 mars 2019: présence du Bâtonnier pour toutes les perquisitions chez l’avocat

La loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 a ajouté un nouvel alinéa à l’article 56-1 du Code de procédure pénalequi prévoit désormais la présence du bâtonnier ou de son délégué avec pouvoir de contestation des saisies pour toutes les perquisitions et visites domiciliaires chez l’avocat par les autorités administratives, notamment l’administration fiscale et la DGCCRF.

Cette disposition est d’application immédiate.

Saul Associés

April 2, 2019

Saul Factory le 25 avril – Art & Startup

Le 25 avril à partir de 19h,  notre Factory débarque au Wiloft de Wilo & Grove, en présence de François-Xavier Trancart, founder de la startup Artsper.

Des conseils gratuits par des professionnels du droit, du chiffre, de la finance et des nouvelles technologies.

L’art & l’entreprenariat font-ils bon ménage ?

Inscription s/ info@saul-factory.com

Saul Associés

March 27, 2019

Soirée, débat & signature autour du livre Un génocide pour l’exemple

Les Éditions du Cerf, la Librairie Galignani  et le Cabinet ont l’immense plaisir de vous convier à une soirée débat, le 18 avril de 18h à 20h, avec Hubert Védrine (suivie d’une signature) à la suite de la parution du livre Un génocide pour l’exemple de Fabrice Epstein.

RSVP à info@saul-associes.com

Saul Associés

March 18, 2019

Relaxe d’un dirigeant pour émission croisée de chèques aux fins de solvabilité apparente: du rôle de la banque

Le Cabinet assurait la défense d’un chef d’entreprise poursuivi pour des faits d’escroquerie consistant dans l’émission croisée de chèques entre les comptes de ses trois sociétés afin de préserver une solvabilité apparente.

La défense invoquait le comportement de la banque au fondement de la relaxe. Celle-ci ayant connu et cautionné ces pratiques, la procédure révélait davantage un partenariat entre la banque et son client que des manœuvres frauduleuses réalisées dans le but de la tromper. En effet, l’agence accompagnait quotidiennement son client dans la réalisation des pratiques qu’elle n’a dénoncées plus tard qu’en raison de la liquidation judiciaire des entreprises.

En première instance, après avoir rappelé que l’élément matériel de l’escroquerie ne peut être caractérisé par la seule émission de chèques sans provision si elle n’est pas accompagnée de manœuvres frauduleuses, le Tribunal avait retenu l’absence de fraude à l’égard de la victime empêchant ainsi la caractérisation de l’infraction.

En appel, la Cour, confirmant la relaxe, a constaté à son tour l’absence de caractérisation de l’infraction et en particulier de l’élément intentionnel, la banque ne s’étant pas opposée aux agissements de son client dont elle avait manifestement connaissance.

Ainsi, des pratiques frauduleuses validées voire encouragées par une banque ne peuvent constituer les manœuvres nécessaires à la qualification de l’infraction d’escroquerie.

 Saul Associés

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