La jurisprudence rendue concernant le régime de la masse des porteurs de bons de souscription d’actions (BSA) et de son représentant est si rare que l’arrêt du 7 mai 2019 rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation mérite l’attention[1].
Une société renommée du secteur aéronautique avait émis des BSA et l’Assemblée Générale des porteurs avait nommé un représentant qui, suite à sa démission, a été remplacé aux frais de la société émettrice sur assignation en référé d’un des porteurs.
Le litige survient alors concernant la rémunération de ce nouveau représentant, la société émettrice se refusant à lui verser toute provision au titre de ses frais et honoraires concernant la période postérieure à l’échéance, si bien que celui-ci forme alors judiciairement cette demande devant le Président du TGI.
Face à cette situation, c’est-à-dire dans l’hypothèse où les conditions de rémunération du représentant de la masse n’ont pas été explicitement déterminées par une décision de la masse, les juges du fond ont alors cru pouvoir appliquer un régime tiré du droit commun de la procédure civile, celui des auxiliaires de justice des articles 719 et 720 du Code de procédure civile, pour condamner la société émettrice à payer la provision querellée au représentant de la masse.
La société, ainsi condamnée forme alors un pourvoi devant la chambre commerciale de la Cour de cassation. La Haute Juridiction va casser l’arrêt rendu par la Cour d’appel. En effet, elle rappelle que le régime spécifique applicable au représentant de la masse de porteurs d’obligations, contenu aux articles L. 228-56 et R. 228-63, est également applicable par renvoi au représentant de la masse de porteurs de BSA.
En conclusion, la Cour de Cassation rappelle que la rémunération du représentant de la masse des porteurs de BSA, lorsqu’elle n’a pas été fixée par l’AG des porteurs, doit nécessairement suivre le régime des articles L. 228-56 et R. 228-63 du Code de commerce. Ainsi, le président du TGI, sur requête, est bien compétent pour fixer le niveau de cette rémunération sur demande de la société ou du représentant. A l’inverse, le régime initialement appliqué par les juges du fond ne leur permettait que l’octroi ou le refus d’une provision pour le montant demandé, et non de fixer le niveau de cette rémunération, ce qui était forcément plus confortable pour le représentant de la masse.
Cette décision récente incitera donc les acteurs d’une émission de BSA à fixer en amont la rémunération de ce représentant, ne pouvant espérer échapper plus tard à sa fixation par un juge.
Saul Associés
[1] Cass. Com., 7 mai 2019, n°17-15.905.