Lorsque les statuts d’une société par actions simplifiée issue de la transformation d’une société anonyme ne mentionnent pas de conseil d’administration, les membres du conseil en poste avant la transformation ont perdu leur qualité d’administrateur.
Dans la mesure où elles sont compatibles avec les dispositions particulières prévues par le Code de commerce sur les sociétés par actions simplifiées (SAS), les règles concernant les sociétés anonymes (SA) sont applicables à la SAS, à l’exception notamment de celles relatives à la direction et à l’administration de la société (C. com. art. L 227-1, al. 3). Les statuts fixent les conditions dans lesquelles la SAS est dirigée (art. L 227-5).
Il résulte de la combinaison de ces textes, vient de préciser pour la première fois la Cour de cassation, que seuls les statuts de la société fixent les conditions dans lesquelles celle-ci est dirigée.
Ce principe a été dégagé dans l’affaire suivante : un administrateur de SA cède sa participation majoritaire dans la société par un protocole prévoyant la révision à la baisse du prix de cession en cas de diminution du chiffre d’affaires si le cédant est maintenu à son poste d’administrateur ; après transformation de la société en SAS, l’acquéreur, invoquant une baisse du chiffre d’affaires, se prévaut de la clause de réduction de prix.
Une cour d’appel lui donne raison et considère la clause applicable au cédant en relevant que, même si les statuts de la SAS ne font pas référence à un conseil d’administration, les documents produits aux débats, dont rien n’autorise à remettre en cause la sincérité, attestent du maintien du conseil au sein de la société après sa transformation et démontrent que le cédant a conservé la qualité d’administrateur.
A tort, juge la Cour de cassation, qui censure cette décision. Les statuts de la SAS ne font pas mention d’un conseil d’administration, si bien que le cédant n’a pas conservé sa qualité d’administrateur à la suite de la transformation et que la clause ne lui est pas applicable.
A noter : les statuts sont la loi des parties au contrat de société. La SAS est certes obligatoirement dotée d’un président pour la représenter (C. com. art. L 227-6, al. 1) mais les autres organes de direction ou d’administration sont librement déterminés par les statuts.
Par la précision inédite qu’il apporte, le présent arrêt, promis à une large publication, renforce l’importance donnée aux statuts dans l’organisation de la société puisque seuls les organes de direction qu’ils instituent font partie de cette organisation, à l’exclusion de tout autre qui serait prévu par d’autres dispositions (par exemple, celles d’un pacte d’actionnaires ou d’un règlement intérieur) ou, comme en l’espèce, par les pratiques en cours au sein de la société (issues, en l’occurrence, d’une « survivance » de l’ancienne SA).
La portée du principe ci-dessus mérite d’être nuancée : « les conditions dans lesquelles la société est dirigée » doivent être entendues comme les organes de direction de la société. Ce principe ne remet donc pas en cause la possibilité de préciser certaines modalités de fonctionnement de ces organes dans un règlement intérieur ou un pacte d’actionnaires.
La Cour de cassation a déjà jugé que c’est par référence aux statuts que doit être réglée la question de savoir si la société peut confier à un tiers le soin d’assurer sa direction générale au moyen d’une convention de prestation de services (Cass. com. 24-11-2015 n° 14-19.685 : BRDA 23/15 inf. 1). La solution ici retenue se situe dans le prolongement de cette décision.
Une autre raison milite en faveur de cette solution : il est admis que la transformation d’une société met fin aux fonctions des organes d’administration ou de surveillance de la société (CA Paris 22-9-2015 n° 14/12205 : RJDA 12/15 n° 833). Le maintien du cédant à son poste d’administrateur allait à l’encontre de cette règle.
Saul Associés